« Il est possible que la Russie se coupe complètement de l’Occident »

Entretien avec l’universitaire Sergueï Medvedev

Sergueï Medvedev est un universitaire, spécialiste de la période postsoviétique, dont le travail s’enrichit des apports de la sociologie, de la géographie et de l’anthropologie de la culture. Il a remporté le prestigieux Pushkin Book Prize 2020 pour son livre The Return of the Russian Leviathan, qui a été largement salué aux États-Unis et en Grande-Bretagne, ainsi qu’en France (sous le titre Les Quatre Guerres de Poutine, Buchet-Chastel, 2020).

Propos recueillis par Galia Ackerman

Dans votre livre, vous écrivez qu’un État féodal est en train de se former en Russie. Pouvez-vous expliquer cette idée ? En particulier, peut-on parler de serfs, un des éléments indispensables à toute société féodale ?

Je vous renvoie à la classification de Simon Kordonski [philosophe et sociologue russe, NDLR], qui a étudié l’État-ressource, à savoir un État qui distribue de l’argent entre les différentes strates de la population depuis de nombreuses années. Qu’est-ce que l’État-ressource ? C’est un pays organisé administrativement, territorialement, sectoriellement et socialement autour de la recherche, de l’extraction et de l’accumulation des ressources, ainsi que de leur distribution en fonction des priorités de l’État. Il s’agit non seulement des matières premières ou des biens déjà produits, mais aussi de la population, de l’éducation, de la santé et des terres. Le travail n’y est pas une marchandise, il est aussi une ressource. Naturellement, l’État-ressource est par principe opposé à l’État capitaliste.

Les corps, ou les castes, sont constitués en fonction des ressources qu’ils contrôlent et dont ils bénéficient. Le premier d’entre eux est celui du pouvoir, qui en est le principal bénéficiaire. Kordonski estime que ce corps représente environ 7 millions d’individus. Ce nombre est peut-être un peu plus élevé, disons qu’il s’élève à 10 millions. Il s’agit du groupe qui contrôle directement les « conduites », c’est-à-dire les ressources pétrolières et gazières. Autrement dit, ce sont les députés de tous les niveaux, les membres des forces de l’ordre et des différents services de sécurité qui poussent comme des champignons, les autorités fédérales et régionales et leur appareil, les hauts fonctionnaires et les gestionnaires des collectivités publiques, les diplomates, etc. Ils jouissent également de privilèges. Par exemple, les enfants des employés du ministère de l’Intérieur, du parquet, du FSB, etc., bénéficient d’une priorité absolue pour les attributions de places dans les écoles ou pour accéder aux meilleurs établissements. Ces gens ont aussi le droit de prendre leur retraite à 40-45 ans, et leurs pensions sont nettement supérieures. Ils perçoivent encore d’autres allocations et profitent de résidences de vacances et de villégiatures à des prix symboliques, comme à l’époque soviétique. En d’autres termes, ils servent le Léviathan et en reçoivent tous les avantages. Ils ont un statut juridique distinct, je le souligne, surtout si l’on s’approche du sommet du pouvoir. L’élite dirigeante compte plusieurs dizaines de milliers de familles qui bénéficient notamment de l’immunité en cas de poursuites judiciaires dans des affaires de droit commun. Par exemple, si un membre de l’élite a provoqué un accident de la route mortel, il se voit infliger un à deux ans de prison avec sursis, tandis qu’un citoyen ordinaire écopera de cinq à dix ans de prison ferme. C’est un système absolument médiéval, où les gens ne sont pas égaux devant la loi.

Le deuxième corps est constitué d’une masse importante et amorphe d’environ 80 millions de personnes, essentiellement des employés d’entreprises publiques qui bénéficient de prestations budgétaires. Rappelons que la gestion étatique de l’économie est en train de renaître en Russie et que les deux tiers du PIB sont produits dans le secteur public : autrement dit, nous sommes presque revenus à la situation soviétique. Cette masse représente, pour ainsi dire, le « second pétrole », elle supporte la majeure partie des charges fiscales et se trouve pressurisée à mesure que les ressources diminuent. Elle a vu relever l’âge de départ à la retraite et s’entend constamment dire que les Russes n’ont pas besoin d’argent, qu’ils ne travaillent pas si dur et que l’État ne leur doit rien. Ce sont les « serfs » des temps modernes.

Le troisième corps comprend les « roturiers », qui gagnent leur vie par eux-mêmes. Ce sont des entrepreneurs ou des salariés de sociétés privées, ou encore des indépendants – des freelance, des avocats, des artistes, des prostituées, etc. Ils tirent leur subsistance non de l’État ou du budget, mais grâce au marché libre. Ils sont 17 à 20 millions en tout, et c’est un corps qui se rétrécit. Ils sont particulièrement accablés par les ponctions des instances de contrôle. En outre, le climat des affaires en Russie est exceptionnellement mauvais, notre pays se classant avant-dernier pour ce qui concerne le niveau d’optimisme des chefs d’entreprise. Au fond, la Russie est totalement dominée par l’État, et c’est Poutine qui a ressuscité ce système.

Pourtant, s’agit-il vraiment d’un État féodal ?

En tout cas, il s’agit d’une société médiévale, où les gens sont « casés » dans les cellules de leurs castes respectives et où l’ascenseur social est limité pour les castes inférieures. Le plus grave, c’est l’inégalité par rapport à la loi et au droit. La caractéristique principale des révolutions bourgeoises était, rappelons-le, l’établissement de l’égalité de tous devant la loi. Or, en Russie, cette égalité a été retirée. Quelque 9 millions de citoyens n’ont pas le droit de voter aux élections, et le nombre de personnes privées de ce droit à cause d’accusations politiques augmente rapidement. La Russie est un pays des plus inégalitaires : inégalité d’accès au droit de vote, inégalité d’accès à la justice, inégalité d’accès aux ressources, inégalité d’accès aux prestations sociales.

Dans la courte nouvelle qui conclut votre livre, vous parlez de « l’éternel itinéraire de l’histoire russe » : l’absence de liberté politique. En même temps, vous montrez que survient un certain éveil des consciences devant la violence, ce qui signifie que la société est en train d’évoluer et qu’elle continuera à produire des opposants.

Je ne suis pas d’accord avec votre postulat selon lequel il y aurait un éveil des consciences de masse en raison de la violence. Certes, il y a des individus progressistes, des femmes qui commencent à protester contre les violences domestiques, des étudiants qui organisent parfois des manifestations, mais ce sont des actes isolés. Ce qui s’est passé en Russie ces dernières années, c’est la banalisation de la violence. Les gens s’habituent à cette violence, au fait qu’ils pourraient être battus par la police et torturés en prison. Et la société l’approuve. Elle approuve ce qui est arrivé à Navalny. Depuis sept mois qu’il est derrière les barreaux, le soutien dont il bénéficie a encore baissé, passant de 18 % à 14 % aujourd’hui. C’est monstrueux. La plupart des Russes pensent que les autorités ont raison de maltraiter et d’emprisonner Navalny, et que ce qui lui est arrivé cet été [son empoisonnement, NDLR] n’est pas clair. Ils reconnaissent à l’État le droit d’utiliser la violence contre un citoyen et de priver celui-ci de son suffrage. De cela découlent toutes les autres violences. La violence des enseignants à l’encontre des élèves, la violence des maris à l’encontre de leurs femmes, la violence des parents à l’encontre de leurs enfants. La Russie repose sur un contrat de violence, qui est de mise dans la police et dans l’armée, à l’école et dans les familles. Certes, sont apparues quelques entorses à ce contrat, la presse progressiste s’indigne, Novaïa Gazeta fait du monitoring, mais c’est une goutte d’eau dans l’océan. Je ne pense pas qu’une personne LGBT, par exemple, puisse passer sa vie en Russie sans subir de violences. Sans parler de l’absence totale de liberté des femmes dans le Caucase.

En outre, je n’exclus pas, si les relations avec l’Europe continuent de se détériorer, que la Russie se retire du Conseil de l’Europe et rétablisse la peine de mort, comme au Bélarus, à la grande satisfaction de l’opinion publique. Le pouvoir trouvera de bonnes raisons pour exécuter cette peine, par exemple pour haute trahison. La Russie suit manifestement la voie du Bélarus. À première vue, la société bélarusse est modernisée et progressiste. Dans les villes, près d’un individu sur deux est informaticien. Les Bélarusses se rendent fréquemment en Pologne et en Lituanie. Pourtant, la société s’est inclinée devant la terreur. Plus personne ne proteste, et le monde extérieur non plus. Le Bélarus est devenu un État terroriste. Et il est impossible d’affirmer que la Russie ne suivra pas la même voie.

Que reste-t-il à faire à ces 14 % de la population qui sont en désaccord avec le régime de Poutine dans des conditions de répression totale ?

Il s’agit d’un choix individuel, très difficile. L’une des options est d’émigrer, bien qu’elle se réduise de mois en mois, avec en outre les contraintes liées à la Covid-19. Pendant toutes ces années, on savait que la porte était ouverte, mais aujourd’hui, il ne reste qu’une petite fente et les possibilités de s’installer en Occident sont elles aussi restreintes. Si vous restez en Russie, vous devez faire un choix moral difficile : camper sur vos positions, dire ce que vous pensez, participer aux rassemblements, tout en mesurant les risques encourus – les risques de responsabilité administrative et pénale, d’être fiché comme « agent étranger », membre d’une « organisation indésirable », de voir vos comptes bancaires confisqués, etc. Il s’agit d’une pression répressive constante. Et, bien sûr, il y a le choix du conformisme : c’est ainsi que vivent des dizaines de millions de personnes tout à fait normales. Après tout, il n’y a pas de catastrophe sociale en Russie, les produits de première nécessité sont relativement abondants, les salaires et les pensions sont payés, les gens ne souffrent généralement pas de la faim, les régions socialement défavorisées sont isolées et n’ont aucune influence sur la situation politique. Personne ne s’intéresse à ceux qui y meurent. Dans l’ensemble, il n’existe aucun moyen pour ébranler cet équilibre. Il s’agit donc d’une croisade et d’un choix moral individuels.

Un grand groupe d’universitaires et d’intellectuels ont récemment signé une lettre appelant à la création d’une université d’Europe orientale où pourraient étudier les futures élites de Russie et du Bélarus, aujourd’hui contraintes d’émigrer. Ce sujet ravive une vieille dispute de l’époque soviétique entre ceux qui considéraient l’émigration comme l’unique issue (c’est mon cas à moi qui ai émigré en 1973) et ceux qui estimaient devoir continuer à faire de la recherche et à développer la culture, même dans les circonstances les plus sombres. Quelle est l’attitude des jeunes intellectuels aujourd’hui ?

Les possibilités d’agir à l’intérieur du pays sont de plus en plus réduites. Tout dollar, tout euro perçu de l’étranger par un individu ou une organisation peut entraîner des persécutions. Il est même possible d’être étiqueté comme « agent étranger » sans avoir reçu d’argent. Supposons que votre article soit publié sur un site web non russe, cela pourrait être considéré comme un soutien administratif venant de l’extérieur. Dans ces circonstances, il est nécessaire de créer des « fenêtres » ouvertes sur le monde afin que les Russes ou les Bélarusses puissent participer à des webinaires et se rendre à l’étranger pour suivre un cursus universitaire. Jusqu’à présent, on n’a arrêté personne pour avoir reçu un diplôme étranger. L’idée de l’université d’Europe orientale est donc logique. Plus largement, nous devons créer de nouveaux centres de culture russe, à l’instar des grands centres de l’émigration russe à Berlin, Prague, Paris, Belgrade, Rome au XXe siècle, pour préserver l’intellect de la nation.

C’est pour empêcher un tel développement que les autorités russes s’efforcent de contrôler la diaspora…

Cela fait partie de la politique de Poutine, et c’est en partie réussi, parce que de nombreux émigrés essaient de conserver leur identité dans leur nouvel environnement. Beaucoup ne sont pas bien installés, ont des conditions de vie précaires, et on leur offre un projet grandiose appelé « la Grande Russie », le « passé glorieux ». Le Kremlin travaille activement avec l’émigration. Pour lui, c’est un champ de bataille.

J’ai le sentiment que le rôle de l’Église a diminué ces dernières années, laissant place aux cultes d’un soviétisme édulcoré et de la « Grande Victoire ». Au fond, ce sont des cultes païens, qui à certains égards font penser aux cultes païens nazis. Partagez-vous cette idée ?

Oui, tout à fait. Nous avons des cultes quasi religieux liés à l’idéologie d’État. Le 9 Mai est une fête quasi religieuse. Des « églises » sont construites pour commémorer la Victoire, comme celle, effrayante, qu’on a bâtie à Koubinka, près de Moscou, et qui s’inspire de la numérologie, voire de la magie noire : elle fait 75 m de haut, pour rappeler les 75 ans de la Grande Victoire, avec un dôme de 14,18 m de diamètre, en référence aux 1 418 jours de la guerre, et des escaliers en fonte pour lesquels on a utilisé des armes allemandes confisquées à titre de trophées. Il devait y avoir des fresques et des mosaïques représentant Staline, Poutine, Choïgou, Matvienko, mais, devant les protestations, il a été décidé de temporiser. C’est le temple de la nouvelle religion, avec ses propres rituels, comme le Régiment Immortel, cette procession lors de laquelle des gens portent des portraits de leurs proches morts au combat, telles des icônes. Une hagiographie est en train de naître : dans des vidéos de propagande, on voit des individus s’adresser à ces portraits comme à des saints. On assiste à une carnavalisation de la Victoire : certains se déguisent, revêtant des uniformes militaires, habillent leurs enfants en soldats, transforment des landaus en chars d’assaut. À l’époque soviétique, tout le monde disait : « Pourvu qu’il n’y ait plus de guerre », mais aujourd’hui, on peut lire sur des autocollants collés sur les voitures : « 1941-1945 : nous pouvons le refaire ! » Les gens sont prêts à faire la guerre ! Le culte de la Victoire s’est transformé en un culte quasi religieux de la guerre, chauvin et militariste. Et l’Église est invitée à s’adapter, à bénir ces actions, à bénir les armes, les parcs de la Victoire et les temples. Cette idéologie a créé ses propres textes canoniques, enseignés dans les écoles, tandis que de nouvelles lois sanctionnent et répriment tout point de vue différent.

L’Église ne peut accepter pleinement la réhabilitation de la période soviétique, alors qu’elle y était humiliée et interdite, que des prêtres étaient persécutés et exécutés, n’est-ce pas ?

L’Église est une institution absolument servile ; elle est intégrée au système de distribution des ressources ; elle est l’un des corps de l’État. Il y a celui des pétroliers, celui des militaires, celui des flics, et puis il y a l’Église, qui fournit ses services idéologiques et de légitimation, en échange d’avantages particuliers qui lui viennent de l’État. Personne n’a intérêt à se souvenir des prêtres pendus et fusillés pendant la période soviétique. D’ailleurs, on voit des orthodoxes zélés se promener avec des icônes de Staline. Écoutez Ziouganov. Chez lui, tout est mélangé : le communisme, le stalinisme, l’orthodoxie, la voie particulière de la Russie.

L’écrivain Vladimir Sorokine a publié Journée d’un opritchnik en 2006. Pensez-vous que la Russie puisse se fermer complètement à l’Occident, comme le décrit sa dystopie, et devenir un vassal de la Chine, pour laquelle les propagandistes russes ont une admiration sans bornes ? On entend souvent déplorer que la Russie n’ait pas suivi la voie chinoise, qu’elle n’ait pas eu « son Tiananmen » pour arrêter la décomposition du régime à la fin de l’époque soviétique.

Le livre de Sorokine est effroyablement prophétique. Quand il a été publié, il semblait grotesque. Il semblait toujours grotesque en 2012. Récemment encore, beaucoup de choses semblaient grotesques. Quand on lisait Zavtra [journal ultranationaliste fondé en 1993, NDLR], les articles de Prokhanov [le rédacteur en chef de Zavtra, NDLR], il y a quinze ou vingt ans, on s’étouffait de rire. Tout comme on gloussait en regardant ces vieux qui faisaient la queue pour aller au musée Lénine ou au musée de la Révolution. Mais il s’avère que Zavtra est arrivé au Kremlin et au Conseil de sécurité, et que la ligne de ce journal est en train de devenir une idéologie d’État, qui affirme que la Russie représente une civilisation à part, en guerre éternelle avec l’Occident… C’est le visage effrayant de la postmodernité russe. Au moment de sa parution, Journée d’un opritchnik était perçu comme un jeu postmoderne avec le discours patriotique, mais subitement le discours s’est transformé en réalité, et des textes ont commencé à tuer des gens. Cela s’était déjà produit avec le marxisme, qui s’était incarné en Russie en tant que dystopie, et non comme une pratique sociale-démocrate civilisée. Aujourd’hui, bien qu’il soit trop tôt pour le dire, je n’exclus pas que la Russie se coupe complètement de l’Occident, qu’elle introduise des visas de sortie du territoire et confisque les passeports. Cela n’affectera nullement la majorité de la population : seuls 5 % des Russes voyagent à l’extérieur des frontières, les autres n’ont jamais visité de pays étranger de leur vie. Et maintenant, à cause de la Covid-19, le pays est complètement fermé. En théorie, je ne vois pas d’obstacles institutionnels pour que cela dure. Les personnes qui nous gouvernent aujourd’hui ont autour de 70 ans. Poutine de même que Lavrov et Choïgou se portent très bien ; ils peuvent rester aux commandes pendant dix ou quinze ans. Nous allons donc vivre dans la Russie de Sorokine encore une bonne dizaine d’années !

Voyez-vous une évolution à la chinoise du système russe ?

On dirait que la Russie est en train de devenir le petit frère de la Chine, son vassal. La haine de la Chine pour l’Occident est telle que la Russie se jette volontiers dans ses bras ; elle est prête à adopter l’expérience de l’autoritarisme numérique chinois. Nous aurons nous aussi une notation sociale, un système de surveillance totale, nos propres réseaux sociaux, notre Internet. Tout cela semble un peu effrayant, bien sûr, mais en Russie, comme toujours, la brutalité de la loi est atténuée par la négligence dans son application. Il y aura toujours des trous dans la clôture russe. Ces lois seront contournées, les gens installeront des proxies, des VPN, ils se connecteront à l’Internet satellitaire d’Elon Musk. Ils trouveront des combines pour voyager à l’étranger ou consommer ici des produits importés. Ce ne sera pas une dictature de type nord-coréen ou une dictature idéologique de type iranien. Ce sera une dictature russe postmoderne, corrompue et prédatrice. Des gens seront tués, la peine de mort sera peut-être réintroduite, mais le spectacle sera surtout très comique. Aujourd’hui même, la Russie de Poutine et les lois qu’elle adopte sont ridicules. Ce qui constituait une tragédie au XXe siècle tourne aujourd’hui à la farce. Le problème est de vivre au sein de cette comédie noire, de ce grand-guignol, sans savoir combien de temps cela va durer. Peut-être cinq ans, peut-être quinze. J’espère qu’un jour, le pétrole russe deviendra inutile et que des changements se produiront… Quoi qu’il en soit, les prochaines années seront à la fois effrayantes et drôles.

Née à Moscou, elle vit en France depuis 1984. Après 25 ans de travail à RFI, elle s’adonne désormais à l’écriture. Ses derniers ouvrages : Le Régiment immortel. La Guerre sacrée de Poutine, Premier Parallèle 2019 ; Traverser Tchernobyl, Premier Parallèle, 2016.

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