Vers un pacte Poutine-Trump ?

La doxa du Kremlin est « souple ». Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’URSS considérait les États-Unis comme son plus grand adversaire idéologique. La direction poutinienne considérait même que la guerre en Ukraine était en réalité celle entre les États-Unis et la Russie et que les Européens n’étaient que des vassaux des USA. Avec Trump, la donne a changé. C’est l’Europe qui est désormais accusée d’être « fasciste », face à l’alliance des forces de la « paix » : la Russie et les États-Unis. Françoise Thom livre une analyse scrupuleuse de cette nouvelle doctrine russe, à partir d’un document récemment publié par le Service du renseignement extérieur russe, le SVR, dont nous publions la traduction (voir ci-dessous).

Le Bureau de presse du SVR vient de se fendre d’un document programmatique qui mérite toute notre attention, car il ambitionne de jeter le fondement historique et idéologique de l’entente russo-américaine qui se dessine depuis le retour au pouvoir de Donald Trump. Ce fondement, c’est le projet de destruction de l’Europe démocratique. On remarquera le tournant dans la rhétorique du Kremlin concernant l’UE. Il ne s’agit plus de l’Europe libérale décadente des gays et des lesbiennes, mais d’une Europe en quelque sorte génétiquement fasciste. Cette évolution s’amorce à l’automne 2024, quand Sergueï Karaganov, un expert proche du Kremlin1, se livre à une violente diatribe contre une Europe « source de tous les maux de l’humanité… L’Europe est la pire chose qui ait été produite par l’humanité au cours des 500 dernières années au moins. Je pense au néocolonialisme, au racisme, aux nombreux génocides, au nazisme, etc. Il faut les éliminer… L’Europe historique doit être jetée dans les poubelles de l’histoire afin qu’elle ne gâche plus la vie de l’humanité. » « L’Europe doit être appelée comme elle le mérite, afin que la menace d’utiliser des armes nucléaires contre elle soit rendue plus crédible et justifiable. », précise Karaganov. Dès janvier 2025, Karaganov avait formulé l’un des objectifs russes : « Il est urgent d’écarter temporairement l’Europe de la solution des problèmes mondiaux. » Ce tournant marque la prise de conscience par le Kremlin que le problème de l’Europe ne sera pas résolu par le retrait américain de l’OTAN. À leur grande surprise, les dirigeants russes s’aperçoivent que les pays européens ne sont pas les caniches des États-Unis, comme le serinait leur propagande depuis 1947, qu’ils ont une volonté propre et qu’ils risquent d’être capables de résister à la poussée impériale russe de leur propre chef.

L’opus du SVR est dirigé prioritairement vers les États-Unis, comme on va le voir. On peut donc s’étonner de ce que Moscou ait abandonné le thème de l’Europe « woke » auquel les trumpiens sont nettement plus sensibles qu’au spectre d’une Europe ataviquement « fasciste » évoqué ici par les historiens en épaulettes du SVR. Ce retournement s’explique par une cause simple qui n’a rien de rassurant pour nous autres Européens. Aux yeux des poutiniens, l’Europe décadente d’autrefois, obsédée par les minorités, livrée à la propagande LGBT, ne posait pas de problème à long terme : elle était vouée à dégénérer et s’éteindre de sa belle mort. En revanche, l’Europe d’aujourd’hui, qui fait bloc derrière l’Ukraine en dépit du lâchage américain, cette Europe qui prend conscience d’elle-même, se réarme et se dresse en face de la Russie, cette Europe de la résistance est perçue comme un ennemi à abattre. Or dans la mythologie du Kremlin, tout ennemi de l’autocratie russe se voit coller l’étiquette « fasciste », voire « nazi ». Le thème de « l’Europe nazie » (ou « fasciste ») annonce que le Kremlin se prépare à la guerre contre l’Europe, de même que la dénonciation des « nazis de Kiev » préparait idéologiquement l’invasion de l’Ukraine.

« L’Europe nazie » est désormais un topos de la propagande du Kremlin. Ainsi, Lavrov s’est indigné du refus des dirigeants européens d’assister à la grande parade du 9 mai2 : « On a du mal à comprendre pourquoi l’UE veut ressusciter l’idéologie européenne du nazisme. » Dans un article intitulé « Comment briser l’échine aux Européens », Karaganov formule un programme d’action : « Nous devons dire en clair aux Européens : vos élites feront de vous la prochaine portion de chair à canon et, si la guerre devient nucléaire, nous ne serons pas en mesure de protéger la population civile de l’Europe, comme nous essayons de le faire en Ukraine (sic)… Bien entendu, les élites européennes doivent être informées qu’elles deviendront, ainsi que leurs résidences, les premières cibles des frappes nucléaires de représailles. Il ne sera pas possible de demeurer planqué. » Et de conclure : « La paix sur le sous-continent ne pourra être établie que lorsque nous aurons brisé l’échine de l’Europe une fois de plus, comme ce fut le cas lors de nos victoires sur Napoléon et Hitler, et lorsque les élites actuelles seront remplacées par une nouvelle génération. Et cela ne se produira pas dans un contexte étroitement européen – l’Europe est finie –, mais dans un contexte eurasien. »

Mais penchons-nous d’abord sur la manipulation de l’histoire à laquelle se livrent les propagandistes poutiniens dans le texte qui nous occupe. Ceux-ci voient en effet dans l’histoire un arsenal où l’on peut puiser des armes pour détruire ou démoraliser l’adversaire, influencer le partenaire potentiel. Ce qui frappe ici, c’est avant tout l’amateurisme des auteurs qui se sont acquittés de la tâche confiée par leurs chefs en rendant une copie bâclée, rédigée par-dessus la jambe. Invoquer le précédent du jacobinisme pour étayer la thèse d’un penchant « fasciste » congénital en France ne manque pas de sel quand on se souvient que les Jacobins ont inspiré Lénine, lequel trouvait d’ailleurs que les révolutionnaires français étaient trop doux et n’avaient pas exterminé suffisamment d’ennemis du peuple. Nos plumitifs du SVR auraient évité de mentionner Drieu La Rochelle comme théoricien de l’eurofascisme s’ils avaient pris la peine de lire les écrits de ce dernier. « Le chemin de Mussolini et celui de Staline vont l’un vers l’autre3 », écrit-il en 1934 dans Socialisme Fascisme, où il parle avec éloge de « l’esprit d’activité virile du bolchévisme et du fascisme4 ». Citons aussi quelques-unes des annotations de son Journal. Le 16 juin 1934 : « Ce redressement, cette renaissance du corps, c’est le ressort le plus intime et le plus puissant des mouvements fascistes, hitlérien, et même bolchevik. » Le 2 septembre 1943 : « Ma haine de la démocratie me fait souhaiter le triomphe du communisme5. »

De même eût-il mieux valu se dispenser de faire parade des collaborateurs français dans les rangs allemands. Avec jamais plus de 6 500 combattants simultanément engagés, la France eut la plus faible contribution en volontaires de toute l’Europe collaborationniste. Du côté soviétique, ils ont été plus d’un million !

Mais les fantassins du front idéologique du Kremlin réservent l’essentiel de leurs flèches à la Grande-Bretagne. Dans leur ardeur à prouver que la brumeuse Albion était encore plus prédisposée au « fascisme » que la France, nos gratte-papiers tchékistes ne font pas de différence entre monarchie et tyrannie, différence pourtant fondamentale formulée par Socrate dès le Ve s. av. J.-C. : « La royauté est le gouvernement d’hommes consentants et des cités en conformité avec les lois, alors que la tyrannie est le gouvernement d’hommes contraints et en violation des lois, selon le bon vouloir de celui qui détient le pouvoir6. » Ils ne dédaignent pas de puiser les arguments étayant leur détestation de l’empire britannique dans la production d’inspiration woke des universités américaines. À les en croire, c’est l’Angleterre qui aurait soufflé à Hitler l’idée des pratiques génocidaires – nos tchékistes font sans doute allusion aux camps de concentration où les Britanniques incarcéraient les Boers en 1900-1901. Mais c’est plutôt l’exemple bolchévique qui a inspiré Hitler – en témoignent les Carnets de Goebbels qui montrent à quel point les dirigeants du Reich s’intéressaient aux méthodes bolchéviques. Rappelons que la Russie avait créé des camps de concentration dès l’été 1918, où Lénine avait ordonné d’interner « les koulaks, les prêtres, les Gardes blancs et autres éléments douteux ». Bref, l’impérialisme britannique dépasserait en horreur le fascisme. La perfide Albion aurait cumulé les forfaits historiques : sympathies pour Mussolini, connivences des élites anglaises pour les nazis, responsabilité pour la guerre froide, soutien au régime de Kyïv – rien n’y manque.

L’extraordinaire animosité à l’égard de l’Angleterre qui s’exprime ici a deux causes. D’abord, l’hostilité russe traditionnelle à l’égard de la Grande-Bretagne, qui a toujours vu clair dans le jeu russe, plus que les autres pays européens, et a fortiori que les États-Unis. On sait que, traditionnellement, la diplomatie britannique a poursuivi un objectif : l’équilibre des puissances en Europe. Dès qu’un pays risquait de s’assurer la prépondérance sur le continent, la Grande-Bretagne agissait pour rétablir l’équilibre. Comme, après la défaite de Napoléon et l’affaiblissement de l’empire ottoman, la Russie était en passe de devenir la puissance dominante en Europe, la Grande-Bretagne intervint et ce fut la guerre de Crimée de 1853-1856, apogée de la russophobie européenne selon la propagande slavophile, en réalité illustration du mécanisme du concert européen. Pour le même motif, le gouvernement britannique joua effectivement un rôle clé dans la genèse de la guerre froide. Cela nous mène à la deuxième raison de cet acharnement sur l’Angleterre. À un moment où la Russie rêve d’un remake du pacte Ribbentrop-Molotov, cette fois avec les États-Unis, pour se partager l’Ukraine et faire reconnaître son hégémonie sur l’Europe centrale et orientale, elle redoute particulièrement la « relation spéciale » entre Londres et Washington. Ainsi, nous trouvons dans l’opus du SVR nombre d’appels du pied dans le sens d’une entente russo-américaine contre l’Europe. Pour plaire à Trump et l’encourager dans ses desseins impérialistes au Canada, le texte fait allusion à l’incendie de Washington (24 août 1814) par une force britannique, lorsque, dans l’espoir de détourner les ressources militaires américaines du Canada, les Britanniques débarquèrent dans la baie de Chesapeake. Ils battirent alors une force américaine à Bladensburg, puis poussèrent jusqu’à Washington, où ils brûlèrent le Capitole et la Maison-Blanche. Comme on pouvait s’y attendre, mention est aussi faite de la guerre de Suez de 1956, où Soviétiques et Américains sont intervenus pour stopper les « enragés européens ».

Les Russes ont beau se féliciter de ce que désormais « la Russie et Trump soient dans le même bateau », ils craignent que Trump ne change de position du jour au lendemain comme il le fait souvent. D’où les efforts convergents de tout l’appareil de puissance du Kremlin pour arrimer Trump à l’attelage russe. De même que Staline se mettait en quatre pour plaire à Hitler au moment du pacte germano-soviétique (août 1939 – 22 juin 1941), au point de donner à Moscou des concerts et des opéras de Wagner (le compositeur favori du Führer), de même Poutine est aux petits soins pour Trump. Il commande son portrait à un artiste russe. Il fait miroiter devant ses yeux éblouis la perspective de construire une Trump Tower à Moscou. Vladimir Medinski, l’ancien ministre de la Culture de Russie, fait savoir qu’il a ordonné la réécriture des manuels d’histoire pour saluer les efforts de Trump pour la paix. Mais le ciment du futur pacte Poutine-Trump doit être la haine de l’Europe et le projet de destruction de l’UE. Les Russes placent beaucoup d’espoirs dans l’idéologue trumpien Steve Bannon qui, selon le politologue Vladimir Mojegov, veut s’appuyer sur la droite européenne afin de « briser le mondialisme européen et créer à la place de l’Europe mondialiste d’aujourd’hui, écrasée par l’euro-bureaucratie, une nouvelle Europe nationale et conservatrice […]. Le géopoliticien Bannon voit un monde de grandes puissances, avec trois puissances principales : l’Amérique, la Chine et l’Eurasie centrale (la Russie, l’Europe, l’Inde). Un monde tripolaire selon ses vues. » Un autre objectif de la campagne de dénigrement de l’Europe lancée par le Kremlin est la démoralisation des Européens par leur culpabilisation (d’où le tableau de l’histoire européenne comme un interminable catalogue de forfaits). À cela, les Européens peuvent rétorquer qu’ils n’ont pas le monopole des abominations :  le passé russe donnerait lieu à un catalogue bien plus accablant. Avec une différence majeure : les Européens ont affronté honnêtement leur passé et en ont tiré les leçons, alors que la Russie s’enivre de ses crimes, exalte les pratiques génocidaires de Staline et s’en inspire. Les Européens savent d’expérience où mènent la folie nationaliste, l’aspiration au Lebensraum, le culte aveugle du chef, le fanatisme, le mépris du droit, l’injustice. Ils savent que l’économie n’aime pas qu’on lui fasse violence et se venge. « La civilisation européenne, écrit Georges Bernanos, à l’exemple de toutes les civilisations qui l’ont précédée dans l’histoire, était un compromis entre le bon et le mauvais de l’homme, un système de défense contre ses instincts. Il n’est pas d’instinct de l’homme qui ne soit capable de se retourner contre l’homme et de le détruire7. » Nous sommes face à deux prédateurs chez lesquels ce système de défense n’existe plus. Tout à leurs rêves d’anéantir les libertés chez les autres, la Russie et les États-Unis sont en train de se détruire eux-mêmes de leurs propres mains. L’hubris se paie tôt ou tard. C’est là le véritable enseignement de l’histoire. Notre devoir d’Européens est de tenir bon, de rester solidaires, de ne pas sous-estimer nos forces, de ne pas surestimer celles de la Russie, d’aider l’Ukraine et de faire échec aux plans des deux fauves qui ourdissent notre perte.


Desk Russie publie en entier ce document officiel révélateur du Service des renseignements extérieurs :

L’eurofascisme, comme il y a 80 ans, est l’ennemi commun de Moscou et de Washington

Bureau de presse du SVR russe, 16 avril 2025

Les analyses rétrospectives des politiques des États occidentaux témoignent de la « prédisposition historique » de l’Europe à diverses formes de totalitarisme, qui engendrent périodiquement des conflits destructeurs à l’échelle mondiale. Selon les experts, la discorde actuelle dans les relations entre les États-Unis et les pays de l’UE accusant D. Trump d’autoritarisme devient, dans le contexte du prochain 80e anniversaire de la Victoire de la Grande Guerre patriotique, un facteur contribuant à un rapprochement conjoncturel entre Washington et Moscou, comme cela s’est produit à de nombreuses reprises dans le passé.

En témoigne notamment le scandale lié aux demandes du député français au Parlement européen Raphaël Glucksmann aux Américains, qui ont « décidé de se ranger du côté des tyrans », de restituer à Paris la Statue de la Liberté, qui avait été précédemment offerte aux États-Unis. M. Glucksmann, représentant des forces globalistes et fervent partisan du régime de Kiev, reproche au locataire du bureau ovale d’avoir affaibli son soutien à l’Ukraine et d’avoir licencié des fonctionnaires aux opinions libérales. Le secrétaire de presse de la Maison-Blanche, K. Leavitt, a mouché le « Gaulois impudent », rappelant qu’il doit au bon vouloir des États-Unis, dont les troupes ont débarqué en Normandie en 1944, la possibilité d’exprimer ses pensées en français, et non en allemand. 

On ne peut que le constater : c’est en France que des régimes dictatoriaux particulièrement atroces et cruels sont arrivés au pouvoir à de nombreuses reprises. Par exemple, la dictature jacobine, qui, en 1793-1794, a tué des milliers de ses propres citoyens et emprisonné 300 000 personnes soupçonnées de « contre-révolution », ainsi que les actions sanglantes de Napoléon. On constate aussi que l’Amérique est libre grâce à la volonté des ancêtres des Américains modernes de résister à des dictatures telles que la monarchie britannique ou la révolution jacobine.

Selon les experts, c’est dans les écrits de l’écrivain et publiciste français Pierre Drieu la Rochelle, qui a collaboré avec les autorités d’occupation allemandes pendant la Seconde Guerre mondiale, que le concept d’eurofascisme a été introduit et que son idéologie a été justifiée comme étant inhérente non seulement aux Allemands, mais aussi aux autres « sociétés » d’Europe. Dans ce contexte, on peut rappeler la division SS française de volontaires, nommée en l’honneur de Charlemagne, l’ « unificateur de l’Europe ». Les soldats de cette unité ont défendu le Reichstag contre l’Armée rouge qui le prenait d’assaut jusqu’aux dernières heures du régime hitlérien. Douze de ces fanatiques nazis ont été capturés aux États-Unis, puis remis au général français Philippe Leclerc. Le 8 mai 1945, sur son ordre et sans délai judiciaire inutile, tous ces criminels de guerre ont été exécutés.

Dans les cercles d’experts conservateurs des États-Unis d’Amérique, on considère l’élite britannique comme fort encline à commettre les crimes les plus graves contre l’humanité, comme l’a mentionné un représentant de D. Trump. Caroline Elkins, professeur à l’université de Harvard, affirme de manière très convaincante que c’est aux Britanniques que le régime totalitaire de l’Allemagne hitlérienne a emprunté l’idée des camps de concentration et la pratique du génocide. Elle souligne que l’ « impérialisme libéral » britannique est une force plus stable et donc encore plus destructrice que le fascisme, car il possède une « élasticité idéologique », c’est-à-dire la capacité de déformer les faits, de dissimuler les réalités et de s’adapter aux situations nouvelles.

Lauren Young, spécialiste de la sécurité et de la défense, évoque les liens étroits entre l’aristocratie britannique, y compris la famille royale, et les nazis allemands. Elle attire l’attention sur une visite en Italie avant le déclenchement de la Grande Guerre par le futur Premier ministre britannique Winston Churchill, qui avait une impression favorable du régime fasciste local. On se souvient que le discours incendiaire de Churchill à Fulton en 1946 a été l’élément déclencheur de l’engagement actif des États-Unis et de l’Europe dans la guerre froide avec l’URSS. Pendant cette période, les Britanniques (par analogie avec la « machine à mentir » de Goebbels) se sont livrés à une « propagande noire », ont mené des opérations de désinformation et des opérations spéciales qui ont entraîné la mort de centaines de milliers de personnes en Afrique, au Moyen-Orient et en Indonésie, soulignent les experts occidentaux.

À cet égard, les analystes ne sont pas surpris par le rôle destructeur de premier plan joué par Londres dans le conflit ukrainien. Les Britanniques encouragent par tous les moyens le régime de Kiev, qui glorifie les bourreaux de Bandera ayant combattu aux côtés d’Hitler et qui commet aujourd’hui lui-même de nombreux crimes contre l’humanité. D’ailleurs, l’Amérique a fait l’expérience des atrocités britanniques en août 1814, lorsque les troupes britanniques ont occupé Washington, brûlé le Capitole et la Maison-Blanche. Selon les experts, il semblerait que  les historiens américains soient allés jusqu’à proposer d’appeler la Grande-Bretagne le premier « empire du mal ».

Les spécialistes rappellent que, par le passé, il est arrivé que Washington et Moscou s’associent pour contrer Londres et Paris sur la scène internationale. La crise de Suez, en 1956, en est un exemple caractéristique : la fermeté de l’URSS et des États-Unis a permis d’arrêter la triple agression de la Grande-Bretagne, de la France et d’Israël contre l’Égypte. Une autre page méconnue de l’histoire occidentale est celle de la guerre de Crimée de 1853-1856, au cours de laquelle la Grande-Bretagne, la France, l’Empire ottoman et le Royaume de Sardaigne se sont unis contre la Russie (à l’instar de l’actuelle « coalition des volontaires »). Tout en observant formellement la neutralité, les sympathies de la Maison-Blanche dans cette confrontation étaient du côté de Saint-Pétersbourg. En témoignent la participation de médecins américains au traitement des défenseurs de Sébastopol, la « volonté de 300 fusiliers du Kentucky » de prendre part à la défense de cette ville, et l’activité de la Compagnie russo-américaine dans la fourniture de poudre à canon et de nourriture à nos forteresses et possessions sur la côte du Pacifique.

Il convient de noter qu’au cours de cette « expédition » en Crimée, les troupes anglo-françaises ont bombardé Odessa, dévasté Eupatoria, Kertch, Marioupol, Berdyansk et d’autres villes de Novorossia, que l’Occident qualifie aujourd’hui d’ukrainiennes. Ces mêmes villes et villages ont été impitoyablement détruits par les fascistes allemands pendant la Grande Guerre patriotique.

Il y a 80 ans, tous les peuples de l’Union soviétique ont participé aux batailles sacrées contre les fascistes allemands et européens. En Crimée, des monuments sont érigés à la mémoire des soldats des unités formées dans les anciennes républiques soviétiques – Azerbaïdjan, Arménie et Géorgie – qui sont morts lors de l’assaut de Sébastopol en 1944. Ces mêmes monuments, ainsi que les tombes des victimes de l’Holocauste, parsèment tout le Donbass, alors que Kiev sympathise avec les bourreaux fascistes et qu’Israël prétend « ignorer » cela.

En ce qui concerne les relations russo-américaines dans le contexte des événements passés et actuels, les cercles d’experts étrangers expriment l’espoir que Moscou et Washington uniront à nouveau leurs efforts afin d’empêcher le monde de glisser vers un nouveau conflit mondial et de contrer les éventuelles provocations de l’Ukraine et des « Européens en proie à la folie », encouragés comme toujours par le Royaume-Uni. 

Traduit du russe par Desk Russie et revu par Françoise Thom

francoise thom

Études de lettres classiques, a séjourné 4 ans en URSS en 1973-8, agrégée de russe, a enseigné l'histoire de l'URSS et les relations internationales à Paris Sorbonne.

Notes

  1. Politologue russe qui dirige le Conseil de politique étrangère et de défense, institution d’analyse des problèmes de sécurité. Il est également doyen de la Faculté d’économie mondiale et des affaires internationales de l’École supérieure d’économie de Moscou. Il est considéré comme proche de Poutine et de Lavrov. NDLR
  2. Les Russes, comme avant eux les Soviétiques, fêtent la victoire sur les nazis le 9 mai, et non le 8. NDLR
  3. Drieu la Rochelle, Socialisme Fascisme, Gallimard 1934, p. 108
  4. Ibid. p. 129
  5. Drieu la Rochelle, Journal, 1939-1945, Gallimard, 1992, p. 353
  6. Xénophon, Mémorables, IV, 6.12
  7. G. Bernanos, Liberté pour quoi faire ? Gallimard 1953, p. 151

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