Depuis des années, des vétérans des deux guerres de Tchétchénie se battent pour l’Ukraine. Il s’agit de Tchétchènes dont des proches ont péri pendant ces guerres et qui aident le peuple ukrainien à combattre leur ennemi commun, la Russie. Après la défaite de Poutine, espèrent-ils, ils pourront reconquérir l’indépendance de leur pays, l’Itchkérie.
Par Lidia Mikhaltchenko, avec la rédaction de Vajnyïe istorii.
Au moins cinq unités tchétchènes se battent aujourd’hui pour l’Ukraine. Leur effectif total dépasse le millier d’hommes, un chiffre qui ne cesse de croître. Il s’agit pour la plupart de Tchétchènes qui ont pris part à la première et à la deuxième guerre de la Tchétchénie contre la Russie, et qui ont été contraints de fuir vers l’Europe, y compris vers l’Ukraine, après leur défaite. Ces unités ont été créées et dirigées par de célèbres commandants tchétchènes qui, avec leurs combattants, ont rejoint la lutte des Ukrainiens contre leur ennemi commun : la Russie. Ils nourrissent l’espoir qu’après la victoire de l’Ukraine, cette dernière les aidera à reconquérir l’indépendance de la Tchétchénie (cet espoir est également renforcé par une résolution de la Rada suprême d’Ukraine reconnaissant l’Itchkérie comme territoire temporairement occupé1).
Sur ces cinq bataillons, quatre font partie de l’armée ukrainienne et perçoivent équipements et fournitures, ainsi que la rémunération prévue pour les soldats ukrainiens (environ quatre mille euros par mois sur la ligne de front). Les Tchétchènes expliquent que le commandement ukrainien fait tout pour perdre le moins d’hommes possible et n’exige pas de conquérir telle ou telle ville « en l’honneur d’un anniversaire ou d’une commémoration »2. Comme les Tchétchènes sont experts au combat, leurs pertes sont minimes. Ils n’aiment pas rester dans les tranchées et sont principalement engagés dans les missions de reconnaissance et de sabotage, en se déplaçant tout au long de la ligne de front. L’un d’eux résume leur mission en disant : « Les Russes se réveillent, et hop, le commandant a disparu ! Ou alors ils le retrouvent mort. »
Les Tchétchènes disent de la guerre en Ukraine qu’elle est plus facile que les guerres qu’ils ont connues dans leur pays. En Tchétchénie, ils devaient rester des semaines sans ravitaillement dans les montagnes, en se contentant de faibles stocks d’armes et de munitions. Certains d’entre eux disent même qu’en Ukraine, pour eux, c’est une guerre « cinq étoiles ».
Le seul bataillon qui ne fait pas partie de l’armée ukrainienne et qui fonctionne grâce à ses propres ressources — en s’appuyant sur des dons, des volontaires et des prises de guerre — est le bataillon Cheikh Mansour3. Il coordonne ses actions avec celles des unités ukrainiennes.
Lidia Mikhaltchenko, correspondante pour Vajnye istoriï, a pu s’entretenir avec plusieurs combattants de ce bataillon.
Arbi : « À Bakhmout, impossible de faire des prisonniers. »
C’est à Zaporijjia, où retentissent les sirènes, que nous rencontrons Arbi. La ville, bien que loin de la ligne de front, est régulièrement frappée par les missiles russes.
Arbi vit en Ukraine depuis 2019. Il y a déménagé pour fuir les hommes de Kadyrov (Kadyrovtsi). L’un de ses frères est mort pendant la première guerre de Tchétchénie, l’autre pendant la seconde. Il n’a pas dit à sa famille qu’il combattait dans le bataillon Cheikh Mansour. Sa mère pense qu’il se trouve à Kyïv.
Le bataillon combat principalement près de Bakhmout, le point le plus chaud de la guerre.
« Ce sont des bombardements vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Si nous combattons, c’est par la volonté du Tout-Puissant. On va aussi au contact en ville. C’est-à-dire que nous sommes dans un bâtiment, et, à cent mètres de là, il y a des Russes dans un autre bâtiment. Impossible de faire des prisonniers. Les Russes ont amassé des zeks4, et ils nous les jettent dessus par vagues. Si les zeks ont été ramenés ici, c’est justement pour qu’ils se fassent tuer les uns après les autres. Je ne vois pas comment on pourrait expliquer cela autrement quand on les voit venir vers nous à découvert alors qu’en face nous avons des mitrailleuses. Après s’être fait repousser, ceux qui sont encore vivants se retirent, puis ils reviennent. Puis on les voit avancer à nouveau, leur artillerie et tout ce dont ils disposent attaquent nos positions. Encore un groupe. Des Orques5 tentent de prendre notre bâtiment, nous ripostons. Ils se replient, leur artillerie les couvre. Ensuite, ils réessaient : une nouvelle attaque, et on leur tire dessus à nouveau. Mais c’est un peu différent de ce qui se passait près de Kyïv, car là-bas, ils arrivaient vraiment de tous les côtés. »
Lors de la deuxième guerre de Tchétchénie, Arbi avait déjà combattu contre la Russie. Il souligne la différence entre la guerre de Tchétchénie et la guerre d’Ukraine. En Tchétchénie, le territoire était plus petit et l’ennemi était donc plus « concentré ». Cependant, la tactique des Russes était la même. Ils avancent en contrôlant le territoire, pied à pied, comme ils l’avaient fait pendant la Seconde Guerre mondiale. Seulement maintenant, ils ont aussi des drones. On voit un drone arriver, et juste après les positions ukrainiennes sont visées par l’artillerie.
Bakhmout s’est transformée en champ de bataille, avec des rues jonchées de gravats et d’éclats d’obus. Les soldats dorment dans des sous-sols. Il n’y a ni électricité ni eau. L’électricité provient des générateurs. Si quelque chose de plus solide vous frappe, comme un S-300, vous pouvez vous retrouver ensevelis au beau milieu de la nuit. Malgré tout cela, il y a des gens qui restent dans la ville et auxquels des volontaires apportent de l’aide humanitaire comme ils peuvent. Arbi dit que Bakhmout ressemble aux villes tchétchènes pendant la guerre.
Presque tous les combattants tchétchènes espèrent qu’après la victoire de l’Ukraine, ils iront libérer leur patrie. Arbi aussi : « Nous espérons que l’Ukraine nous aidera. Je veux vivre sur ma terre comme je l’entends, pas comme on me l’impose. ». Il est convaincu que dans la société tchétchène, comme c’était la coutume autrefois, le chef doit être élu et non désigné : « Le plus important est qu’aucune force extérieure ne nous impose un chef. Nous devons pouvoir mettre n’importe quelle personne à ce poste, pourvu que nous le choisissions, que ce soit un homme élu. De plus, dans notre tradition politique, ce n’est ni le président ni le chef qui décide de quoi que ce soit tout seul. Dans notre société, il y a neuf toukhoums67. Chacun d’entre eux envoie un représentant au Conseil [des Vieux]. Traditionnellement, les Tchétchènes règlent toutes les questions politiques, sociales et économiques au sein de ce Conseil. »
Sabah, un autre combattant du bataillon Cheikh Mansour vient à notre rencontre. Ce n’est pas son vrai nom, mais un pseudo. Arbi nous dit que Sabah a eu de la chance. L’autre jour, lui, Idris et Islam discutaient sur la ligne de front et un obus de char est tombé à cinq mètres d’eux. Personne n’a été blessé. Heureusement que cet obus ne produisait pas d’éclats comme une mine. Sabah tape sur l’épaule d’Arbi : « C’est mon vieux compagnon d’armes, il fait le modeste mais je connais son passé : plus d’une fois, il a fait verser une larme à une mère russe. »
Sabah : « Je passerai ma vie à lutter contre la Russie. »
Sabah raconte que les Russes ont fait venir les meilleurs spécialistes militaires près de Bakhmout.
« Dans une autre zone de combat, on prenait une position et on installait les mortiers, puis on frappait. Et c’est seulement à ce moment-là que nous étions détectés, et que l’artillerie ennemie se mettait à nous viser. A Bakhmout, à peine on apparaît quelque part qu’un drone russe nous détecte. »
Sabah a 36 ans et est arrivé en Ukraine en passant par l’Europe occidentale. Il se souvient de la première guerre de Tchétchénie. Il avait huit ans quand elle a commencé.
Samachki, le village natal de Sabah, est devenu le symbole de la boucherie invraisemblable perpétré par les forces de sécurité russes. Sabah raconte : « Les militaires russes ont dit que si les villageois faisaient sortir du village tous ceux qui s’apprêtaient à résister, ils donnaient leur parole qu’ils ne feraient que vérifier les passeports et partiraient sans faire de mal à personne. Les villageois les ont crus. Mais les Russes sont quand même rentrés dans le village et ont commis des atrocités. Notre famille a survécu uniquement en se cachant dans une cave sous les ruines d’une maison. Je me souviens de soldats russes qui marchaient juste au-dessus de nos têtes à la recherche de gens. On les entendait s’appeler les uns les autres : « Sania ! », « Vania ! « . Ils faisaient des maraudes, comme ils font maintenant en Ukraine. »
À Bamout, un village situé près de Samachki, il y a aussi eu des combats à l’époque. « Pour moi, Bakhmout, c’est Bamout, car ce sont les mêmes bombardements constants », dit Sabah.
Pendant la deuxième guerre de Tchétchénie, il a fait du renseignement. Dès ses 14 ans, pendant les vacances scolaires, il « partait en forêt », c’est-à-dire qu’il prenait le maquis pour aider les partisans. Sans éveiller le moindre soupçon, le jeune garçon se rendait dans les villes et républiques voisines où étaient cantonnés les militaires russes, afin de recueillir des renseignements sur l’emplacement et les effectifs de l’armée.
La Tchétchénie a perdu la deuxième guerre. En 2005, Sabah s’est rendu en Ukraine en train. Les gardes-frontières ne l’ont pas laissé entrer, ont apposé un tampon avec la mention « Zaboroneno » (« Interdit » en ukrainien) sur son passeport et l’ont renvoyé en Russie. Sur le chemin du retour, il a sauté du train et a franchi la frontière à pied, une frontière qui n’était pas contrôlée à l’époque. D’Ukraine, Sabah est passé en Slovaquie et de là en Autriche. « Je pensais que j’allais en Australie, mais je me suis trompé », se rappelle-t-il. A ce moment-là, il s’est rendu à la police, a reçu le statut de réfugié et est resté en Europe. « J’étais indifférent à l’endroit où j’allais vivre. Après des années de lutte armée, je ne rêvais que d’une chose : me déshabiller et me mettre au lit. C’est resté mon seul rêve pendant longtemps. »
Après le départ de Sabah, les Kadyrovtsi sont venus à plusieurs reprises à son domicile, ont menacé les membres de sa famille, ont enlevé sa mère et son frère. Ils n’ont cessé d’inquiéter sa mère que lorsque celle-ci est vraiment tombée très malade. Son frère est toujours périodiquement détenu et torturé.
C’est le cousin de Sabah, commandant adjoint du bataillon Cheikh Mansour, qui a longtemps essayé de le convaincre de venir se battre en Ukraine. « J’ai hésité pendant plusieurs années. Comment quitter une vie de rêve dans laquelle vous pouvez rentrer chez vous, manger et dormir, et que votre plus grand souci est de vous lever et d’aller travailler ? C’était difficile pour moi de revenir dans la guerre, les morts, les larmes des femmes et des enfants. Je savais très bien ce que c’était et je ne voulais pas le faire, je retardais le moment. Je savais que je serais ensuite coincé ici pour longtemps. Mais en 2019, j’ai fini par débarquer à Marioupol, au camp de base du bataillon. Et c’est également à Marioupol que j’étais quand la guerre totale a commencé. »
Sabah ne reviendra plus en arrière : « Je suis un habitant de la République tchétchène d’Itchkérie et je me suis toujours senti comme tel. Nos pères nous ont appris à tirer avec des fusils de chasse lorsque nous étions enfants. Je passerai ma vie entière à me battre contre la Russie. Je vengerai les Tchétchènes qui ont été tués. Je ne pardonnerai jamais aux Russes, et si j’ai des fils, ils continueront comme moi. »
Naïb : « Loin de la guerre, je ne peux pas vraiment dormir. »
Naïb (son nom a été changé) se rappelle comment il s’est retrouvé à la guerre.
« J’étais étudiant en 1994. Alors que je me baladais à Grozny après mes cours, j’ai vu des avions russes bombarder la ville. Sous mes yeux, des civils ont été tués. J’ai ramassé des cadavres, et ce jour-là, j’ai complètement changé, j’ai en quelque sorte perdu mon âme. Rien sur cette planète ne me plaisait ou ne m’intéressait plus, c’est comme si j’étais devenu vide. »
Naïb fait partie de ces Tchétchènes qui, en 2014, ont abandonné leur vie européenne pour rejoindre le combat en Ukraine.
« Le bataillon Cheikh Mansour n’est rejoint que par ceux qui ne sont pas intéressés par le salaire mais qui n’ont qu’un seul but : rentrer chez eux et libérer leur pays. Nous acceptons toutes sortes de gens. Nous ne nous soucions pas du métier ou de l’expérience militaire des volontaires. L’essentiel est que la personne soit patriote et motivée. »
Lors des courts déplacements qu’il fait en Europe, il ne se sent pas à l’aise. Il est habitué à vivre dans la guerre. « Les sensations extrêmes me manquent, je me suis habitué à vivre dans l’adrénaline. Je dors bien sur la ligne de front dans le bruit des explosions comme c’était le cas dans les montagnes de Tchétchénie. Loin de la guerre, je ne peux pas vraiment dormir. Je commence à faire des cauchemars où je suis fait prisonnier. J’essaie de me faire exploser et je n’y arrive pas. J’essaie de me tirer une balle et je me loupe. Dans mes cauchemars, on me prend vivant. »
Aslan : « Il m’a dit qu’il s’engageait dans cette nouvelle guerre contre la Russie. »
Aslan Malsagov vient du village tchétchène de Vedeno. Dans sa jeunesse, il a servi dans l’armée soviétique en Ukraine. Il dit que s’il n’y avait pas eu la guerre, il serait resté là-bas. Mais en 1994, il est rentré défendre sa patrie.
« Toute ma famille est morte. Mes parents et ma sœur ont été tués dans leur maison à Vedeno en 2000 : un obus a touché leur maison. Mes deux frères et moi avons combattu ensemble. Tous deux ont été tués à des moments différents, en défendant Grozny. »
En 2001, Malsagov a été blessé et sa femme l’a aidé à partir pour l’Azerbaïdjan muni d’un certificat attestant qu’il était un civil blessé par des éclats d’obus. Un an plus tard, il est parti en Ukraine où il est resté.
En 2014, Issa Mounaïev, ancien commandant de Grozny et son compagnon d’armes de longue date, est venu lui rendre visite. « Avant l’Ukraine, je l’ai vu pour la dernière fois à Grozny lorsque notre unité était en train de quitter la ville. Il nous a demandé de revenir dans la ville car c’était trop dangereux. Il a dit : « Ne partez pas, vous sortirez plus tard, ce soir ». Les Russes nous bombardaient de tous les côtés, il y avait beaucoup de blessés. Je pensais que je ne le reverrais jamais. Son arrivée était donc absolument inattendue. Je sors et je tombe sur lui, debout devant moi, il s’est mis à pleurer : nous ne nous étions pas vus depuis tant d’années, nous avions traversé tant de choses ensemble… Il m’a dit qu’il s’engageait dans cette nouvelle guerre contre la Russie et j’ai voulu y aller avec lui. On s’est rendus dans une base vers Dnipro. Mouslim Tcheberloevsky, l’actuel commandant du bataillon Cheikh Mansour, était présent. J’ai déchiré mon passeport russe devant tout le monde et je l’ai jeté, pour que mes camarades sachent que je ne partirais pas et que je resterais avec eux jusqu’au bout. »
Bogdan : « Dans leurs maisons, les gens commenceront à se murmurer à l’oreille que le bataillon Cheikh Mansour est sur le point d’arriver. »
Bogdan a la soixantaine. Les hommes du bataillon lui accordent le respect dû à un ancien. Ils le présentent comme leur aksakal8. Bogdan est le chef du service d’information du bataillon.
Il est né à Grozny de parents qui étaient rentrés d’exil, du Kazakhstan, où Staline avait déporté les Tchétchènes en 1944. Ingénieur civil de métier, il dit n’avoir jamais pris les armes lui-même. Il n’a pas été « en forêt » (au maquis). Pourtant dès le début de la première guerre de Tchétchénie, il s’est mis à aider l’armée tchétchène. « Les Russes ont fait de Grozny un tas de ruines. A l’époque, on apprenait qu’une maison était en feu quelque part, on accourait. Il y avait des morts, on les emmenait. »
Après le début de la deuxième guerre, en 2000, Bogdan a fait sortir sa famille de Tchétchénie et est resté sur place pour aider les insurgés. Puis la guerre a été perdue. « J’ai décidé qu’il valait mieux partir pour l’Europe et raconter, depuis l’étranger, la vérité sur ce qui s’était passé. Je me suis lancé dans les affaires et j’ai aidé la résistance tchétchène en donnant de l’argent. On aidait nos compatriotes qui se retrouvaient dans les prisons russes à purger des peines à vie. »
Bogdan est arrivé en Ukraine à la fin de l’année 2013, au début du Maïdan. Lors d’un rassemblement, il a brûlé son passeport russe.
« La majeure partie du bataillon est à Bakhmout, explique-t-il. Certains sont à Kherson, d’autres à Houliaïpole. Nous essayons de ne pas concentrer toutes nos forces au même endroit. Par deux fois, notre camp de base a été frappé par un missile. Les Kadyrovtsi sont après nous, et nos emplacements ne sont pas si difficiles à reconnaître. C’est pour cela que nous sommes dispersés et mobiles. Pour des opérations de reconnaissance et de sabotage, des groupes de deux ou trois hommes suffisent. »
Bogdan espère qu’après sa défaite en Ukraine, la Russie commencera à se désintégrer. Voici la façon dont il imagine la libération de la Tchétchénie : « En Russie, la situation aura changé. Nous traverserons la Géorgie avec des armes pour aller libérer les régions montagneuses de la Tchétchénie. Et ainsi, progressivement, nous libérerons ville après ville. Si nous sommes mille soldats au début de l’opération, en une seule semaine, nous serons déjà 60 000. Les jeunes nous rejoindront par les chemins de montagne. Avec nos propres forces, nous commencerons à libérer notre république. Dans leurs maisons, les gens commenceront à se murmurer à l’oreille que le bataillon de Cheikh Mansour est sur le point d’arriver. Ce sera un mouvement de libération nationale. Plus nous avancerons, plus la vague du peuple grandira. Et quand nous serons au cœur de notre pays, il y aura une telle masse de partisans autour de nous que les derniers Kadyrovtsi seront éliminés à mains nues. »
Traduit du russe par Clarisse Brossard.
Les unités tchétchènes qui se battent du côté ukrainien
Bataillon Djokhar Doudaïev
Premier bataillon tchétchène en Ukraine, il a été créé en mars 2014. Les engagés volontaires étaient dirigés par Issa Mounaïev, un célèbre général de brigade, vétéran des deux guerres de Tchétchénie, puis par Adam Osmaïev après le décès de Mounaïev en 2015. En 2022, le bataillon a participé à la défense de Kyïv, Izioum, Kharkiv et Bakhmout.
Bataillon Cheikh Mansour
Bataillon fondé en octobre 2014, il fait partie depuis 2015 de l’Armée des volontaires d’Ukraine. Comme le bataillon Djokhar Doudaïev, il est composé principalement de Tchétchènes installés en Europe. Son commandant est Oumkhan Avtaïev, connu sous le nom de Mouslim Tcheberloevsky. Le bataillon a participé à la défense de Kyïv en 2022 et participe maintenant aux combats à Bakhmout.
Bataillon « Chalena Zgraïa » (« La bande déchaînée »)
Créé en 2014, ce bataillon fait partie de la 57e brigade indépendante d’infanterie motorisée de l’Armée de terre des Forces armées ukrainiennes. Son commandant est Kazbek Abdourzakov (pseudo Dzourdzouk). Il a pris part aux combats dans le Donbass.
Bataillon séparé spécial
Établi en juillet 2022, il fait partie de la Légion étrangère de la défense territoriale de l’Ukraine. Le bataillon comprend certains combattants du bataillon Cheikh Mansour qui ont souhaité signer un contrat officiel avec l’armée ukrainienne. Son commandant est Hadji Mourad Zoumso. Il a participé à la libération de la région de Kherson et aux combats pour le Donbass.
Bataillon Khamzat Guelaïev
Créé en 2022, il fait partie de la Légion étrangère de la défense territoriale de l’Ukraine.
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Note : Le titre de cet article est une reprise du premier vers de l’hymne national de l’Ukraine : « L’Ukraine n’est pas encore morte » (« Chtche ne vmerla Oukraïna ») en changeant Ukraine par Itchkérie, le nom de la république de Tchétchénie indépendante de facto entre 1991 et 2000. [Toutes les notes sont de la traductrice]
Journaliste freelance qui publie depuis le début des années 2000 sur le Caucase nord où elle s’est rendue à de nombreuses reprises. Depuis février 2022, elle se rend en Ukraine pour couvrir la guerre, notamment en racontant l’histoire des combattants caucasiens qui se battent pour l’Ukraine.
Notes
- À ce sujet, lire Desk Russie.
- Ce qui correspond à une pratique fréquente dans l’armée russe.
- Du nom d’un combattant tchétchène, grand leader de la lutte armée des Caucasiens contre les Russes à l’époque de la conquête coloniale du Caucase sous Catherine II (XVIIIe siècle).
- Détenu des colonies pénitentiaires russes, terme popularisé en France par Soljenitsyne dans l’Archipel du Goulag.
- Surnom le plus fréquent utilisé en Ukraine pour qualifier les Russes. Lire à ce sujet : Les mots de la guerre et Le bestiaire de la guerre sur Desk Russie.
- Regroupements de différents clans tchétchènes (ou taïps) en alliances politiques et économiques
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- Terme utilisé dans le Caucase et en Asie centrale pour désigner un homme âgé et sage. Le mot est d’origine turcique et signifie littéralement « barbe blanche ».